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Mohand Fellag, dit Mohamed Fellag (en arabe محمد فلاق ; en berbère ⴼⴻⵍⵍⴰⴳ) ou simplement Fellag ou parfois Mohamed Saïd Fellag, est un acteur, humoriste, metteur en scène et écrivain algérien d’expression kabyle né le à Azeffoun en Algérie,.
Biographie
Mohamed Fellag est né à Azeffoun (appelée alors Port-Gueydon) en Kabylie. Né d'une famille modeste — sa mère est femme au foyer, son père technicien en hydraulique et il a trois frères et trois sœurs dont il est l'aîné —, il ne parle que le kabyle jusqu'à ce que la famille s'installe à Alger alors qu'il a huit ans. Il apprend alors l'arabe algérien et le français.
Son père, militant FLN pendant la guerre, est tué dans un accident de voiture en 1965 lors d'une mission (le jeune Fellag a 15 ans).
Il fait des études de théâtre à l'Institut national d'art dramatique et chorégraphique d'Alger, situé à Bordj el Kiffan, de 1968 à 1972. À cet âge, dira Fellag, « c'était faire l'acteur ou le suicide ».
Après avoir terminé ses études, il quitte l'Institut national et fonde sa compagnie avec d’anciens élèves, produisant des spectacles dans plusieurs théâtres d'Algérie. Ils écrivent des textes, partent en tournée, jouent dans les prisons, les usines, etc. N'y tenant plus sous le régime autoritaire de Boumédiène, il émigre au Québec en 1978, puis à Paris en 1982, vivant de petits emplois. En , il retourne en Algérie, « revoir Alger et reprendre ses rêves », et est engagé par le Théâtre national algérien pour interpréter L'Art de la comédie de Eduardo De Filippo. Il travaille en tant que comédien et metteur en scène et commence à écrire ses textes, dont son premier spectacle, Les Aventures de Tchop, en 1986. Il devient une vedette grâce à des performances mêlant berbère, arabe et français. À cette époque d'éphémère libéralisation qui précéda la décennie de guerre civile, il est le premier à oser plaisanter en public du président algérien et de la sécurité militaire. « À tous les niveaux, son numéro rompait avec les usages », raconte l'acteur Mustapha Laribi. Même au Maroc et en Tunisie, partout où la télévision nationale algėrienne — symbole absolu de la langue de bois officielle — est captée, le spectacle provoque un véritable séisme. Fellag se permet tout, rien ne l'arrête. Pour le peuple, il représente bien plus qu'un humoriste, il est adulé comme un véritable héros populaire.
En 1991, Babor Australia est créé en kabyle, puis joué en arabe algérien à Paris. Au théâtre de l'Europe en 1992, il est joué alternativement en kabyle et en arabe algérien. Babor Australia, actualisé en Un bateau pour l'Australie en 2002, est basé sur une rumeur évoquant l'arrivée prochaine à Alger d'un bateau australien supposé emmener des chômeurs pour leur procurer là-bas emploi et logement, rumeur qui provoqua une longue file d'attente devant l'ambassade d'Australie.
Il dirige quelque temps le théâtre de Béjaïa, à l'est d'Alger, en 1992-93.
En pleine guerre civile algérienne, Fellag part en tournée en 1994 avec Babor Australia, en Algérie puis en Tunisie. À la fin de l'année, il s'établit à Tunis où il crée Delirium. En 1995, il s'exile à Paris. Il y écrit Djurdjurassique Bled, qui est représenté alternativement en kabyle et en arabe algérien. Puis, il l'adapte en français et ce premier spectacle dans la langue de Molière, créé en , lui vaut le Prix du Syndicat de la critique 1997-1998, révélation théâtrale de l'année.
S'ensuivent alors de nombreux spectacles, dont le dernier, Bled Runner, produit pour la première fois en 2016 au Théâtre du Rond-Point à Paris et qui fera l'objet d'une longue tournée, est un florilège des scènes les plus marquantes de ses comédies.
Fellag, également acteur dans une vingtaine de films et auteur d'une dizaine de livres, a vécu avec la comédienne Marianne Épin, morte le , qui a mis en scène plusieurs de ses derniers spectacles.
Accueil critique
Daniela Morella : « [S]es spectacles […] racontent avec un humour corrosif l'histoire et le présent tragique de l'Algérie ainsi que la vie en émigration, les difficultés quotidiennes, les tabous, les histoires de folie ordinaire, le désarroi individuel et collectif. »
Michèle Bourcet, Télérama : « Avec un humour dénué de tout manichéisme, Fellag porte un regard à la fois incisif et plein d'humanité sur ses concitoyens et sur nous, les Français. Un message plus que jamais indispensable. »
Fabienne Darge, Le Monde : « Un humour plein de poésie, de sens de l'absurde et surtout de tendresse. C'est irrésistiblement drôle. »
Albert Algoud, Le Canard Enchaîné : « Des souvenirs riches d'atmosphères, d'émotions intenses et de personnages pittoresques qui s'inscrivent dans l'histoire de tant d'espoirs déçus. Fellag, lui ne déçoit pas !. »
Julia Molkhou, LCI : « C'est tendre, intelligent, drôle et sans pareil. »
Sylvain Merle, Le Parisien : « Fellag fait du bien. »
Spectacles
1987 : Les Aventures de Tchop, à Alger
1989 : Cocktail Khorotov, spectacle en dialecte algérien, Petit Théâtre de Riadh-el-Fath, Alger
1990 : SOS Labès.
1991 : Un bateau pour l'Australie (Babor Australia), duquel a été tiré un DVD (2002)
1991 : Sinni, adaptation en kabyle par Mohya des Émigrés (pl) de Sławomir Mrożek au théâtre de Bougie
1994 : Delirium, à Tunis.
1995 : Djurdjurassic Park, Théâtre du Gymnase Marie-Bell, Paris
1997 : Djurdjurassique Bled, Théâtre international de langue française, Paris
2001 : Rue des petites daurades, Théâtre international de langue française, Paris
2002 : Le Syndrome de la page 12, Théâtre du Rond-Point à Paris
2003 : Che bella la vita !, Théâtre international de langue française, Paris
2003 : Opéra d’Casbah, « mise en images » Jérôme Savary, avec Fellag, Biyouna, Abdou Elaïdi, un orchestre arabo-andalou et des danseuses; Espace Saint-Jean (sous chapiteau), Marseille
2004 : Le Dernier Chameau mise en scène de Patrick Sommier, MC93 Bobigny, duquel a été tiré un DVD (2005), Théâtre des Bouffes du Nord, Paris
2007 : L'Ère des Ninjas et Djurdjurassic (Les Dinosaures)s spectacle en dialecte algérien et en français, Théâtre du Gymnase Marie-Bell
2008 : Tous les Algériens sont des mécaniciens, mise en scène de Marianne Épin et l'auteur, Les Nuits de Fourvière, Lyon
2011 : Petits Chocs des civilisations, mise en scène de Marianne Épin
2016 : Bled Runner, mise en scène de Marianne Épin
Metteur en scène
2008 : Comment réussir un bon petit couscous de Fellag, CNCDC (Centre national de création et de diffusion culturelles) de Châteauvallon, Ollioules (Var), interprété par Bruno Ricci
2008 : Tous les Algériens sont des mécaniciens, mise en scène avec Marianne Épin.
Rue des petites daurades, roman, éd. JC Lattès, Paris, 2001.
C'est à Alger, couverture de Slimane Ould Mohand, éd. JC Lattès, Paris, 2002, (ISBN 2-70-962369-2) — recueil de cinq nouvelles : La théorie des Dominos, datée Bab El Oued 1975 ; Le nègre de midi ; La balle ; Allô ! ; Alger-New York Fellag, C'est à Alger, JC Lattès, , 216 p. (ISBN 978-2-7096-3184-6, lire en ligne).
Comment réussir un bon petit couscous suivi de Manuel bref et circoncis des relations franco-algériennes, éd. JC Lattès, Paris, 2003, (ISBN 2-7096-2323-4).
Le Dernier Chameau et autres histoires, nouvelles, éd. JC Lattès, Paris, 2004, rééd. J'ai Lu 2010, (ISBN 978-2-290-00905-5).
L'Allumeur de rêves berbères, illustrations de Slimane Ould Mohand, éd. JC Lattès, Paris, 2007, (ISBN 978-2-7096-2670-5).
« Le miroir de la mémoire commune », préface à Jacques Ferrandez, Dernière demeure, Casterman, 2007
Le Mécano du vendredi, illustrations de Jacques Ferrandez, JC Lattès, Paris, 2010, (ISBN 978-2-7096-3341-3).
Un espoir, des espoirs, éd. JC Lattès, Paris, 2014, (ISBN 978-2-7096-4772-4).
Filmographie
Cinéma
1983 : Liberté, la nuit de Philippe Garrel - Mohand
1986 : Sombrero de Rabah Boubras
1988 : El-Khamsa de Belkacem Hadjadj
1989 : Hassan Niya
1990 : De Hollywood à Tamanrasset - Green Eagle
1998 : Le Gone du Chaâba de Christophe Ruggia
2001 : Inch'Allah dimanche de Yamina Benguigui
2002 : Fleurs de sang de Myriam Mézières
2003 : Momo mambo de Laïla Marrakchi
2005 : Voisins, voisines de Malik Chibane - Maklouf
2006 : Michou d'Auber de Thomas Gilou
2007 : L'Ennemi intime de Florent Emilio Siri
2009 : Les Barons de Nabil Ben Yadir
2010 : Il reste du jambon ? d'Anne Depétrini
2010 : Dernier étage, gauche, gauche d'Angelo Cianci
2011 : Le Chat du rabbin de Joann Sfar et Antoine Delesvaux - le Cheikh Sfar (voix)
2012 : Ce que le jour doit à la nuit de Alexandre Arcady - Mohamed
2018 : Moi et le Che de Patrice Gautier
Télévision
2005 : Rue des figuiers de Yasmina Yahiaoui
2008 : La Veuve tatouée de Virginie Sauveur
2010 : Ni reprise, ni échangée de Josée Dayan - Gérard
2013 : Je vous ai compris de Franck Chiche - Hakim, le père de Malika
Radio
Les 1001 histoires de Fellag, chronique diffusée le dimanche de à sur France Culture,
Distinctions
1997/1998 : Prix de la révélation théâtrale de l'année du Syndicat de la critique, pour Djurdjurassique Bled, Théâtre international de langue française, Paris
2003 : prix Raymond-Devos de la langue française
2003 : prix de la Francophonie, décerné par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)
2003 : prix de l'Humour noir, pour Un bateau pour l’Australie.
2012 : prix Génie, interprétation masculine dans un premier rôle, Bachir Lazhar, dans le long métrage dramatique Monsieur Lazhar
Molières 2014: nomination au Molière seul(e) en scène pour Petits chocs des civilisations
Notes et références
Notes
Références
Annexes
Bibliographie
« Les 100 personnalités de la diaspora africaine : Fellag », in Jeune Afrique, no 2536-2537, du 16 au , p. 62
Olivier Mongin, « Fellag, l'entrechoquement des langues et des identités », dans De quoi rions-nous ? Notre société et ses comiques, Plon, 2006
(en) Ruth Weiner, « Djurdjurassique Bled (review) », Theatre Journal (en), vol. 51, no 4, , p. 470-472
Malika Boussahel, « Contact et contraste des langues dans Djurdjurassique Bled de Fellag », in Synergies Algérie no 7, Littérature comparée et interculturalité, 2009, p. 121-140
Mireille Rosello, « Fellag, plat national et demande d'amour subliminale », dans Isaac Bazié, Peter Klaus (dir.), Canon national et constructions identitaires dans les Nouvelles Littératures francophones, Neue Romania, 33, été 2005, p. 253-266
(en) Mireille Rosello, The Reparative in Narratives : Works of Mourning in Progress, L'Liverpool University Press, coll. « Espaces discursifs », , 237 p. (ISBN 978-2-7475-6249-2 et 2-7475-6249-2, lire en ligne)
Dominique Caubet, Les Mots du bled : Entretiens avec Fellag, Cheb Sahraoui, Allalou, Fadhel Jaïbi, Baâziz, Aziz Chouaki, Gyps, Amazigh Kateb, Rachid Taha, etc., Paris/Budapest/Torino, L'Harmattan, coll. « Espaces discursifs », , 237 p. (ISBN 2-7475-6249-2, lire en ligne)
(en) Khalid Amine et Marvin Carlson, The Theatres of Morocco, Algeria and Tunisia : Performance Traditions of the Maghreb, Springer,
Dominique Caubet, « Humour et défigement des expressions figées au Maghreb chez les humoristes Mohamed Fellag et Gad Elmaleh », Rencontres Linguistiques Méditerranéennes : Le figement lexical, no 1, 1998, p. 351-360
Dominique Caubet, « Un exemple concret d’alternance de codes en Algérie : les spectacles de Mohamed Fellag », in Caroline Juillard, Louis-Jean Calvet (éds), Les Politiques linguistiques, mythes et réalités, 1996, p. 109-113
Daniela Merolla, De l'art de la narration tamazight (berbère) : 200 ans d'études : état des lieux et perspectives, Peeters Publishers,
Sandrine Blanchard, « Fellag : La colonisation est devenue un fonds de commerce », Le Monde, .